New york, la ville qui ne dort jamais. Jeunesse dorée, costumes bien taillés, petite vie parfaite, existence rêvée. La grosse pomme qui défile à travers vos écrans de télé, ou même dans les séries télévisées. Des habitants toujours plus riches et toujours plus heureux, de beaux quartiers, des bâtiments somptueux. Le drapeau qui flotte dans le ciel, toujours bleu. La statue de la liberté, la tête dans les nuages, grande, belle, pour laquelle on se bouscule à longueur de journée, hivers comme étés.

C'est ainsi que l'on voit la célèbre ville, n'est-ce pas ? Puis, se faufilant à travers les rues bondées, entre les femmes à talons hauts qui hurlent à travers leur téléphone à neuf cent balles et les hommes aux chaussures bien cirées qui marchent pour se rendre à leur travail bien rémunéré, il y a la vérité. La vérité qu'on s'obstine à snober, la vérité qu'on fuit comme la peste. Invisible, invisible aux yeux de ceux qui ont tout réussi, aussi invisible que ces gens habillés de lambeaux, qui rasent les murs, qui baissent les yeux, qui n'ont eu droit qu'à rien et qui regardent vivre silencieusement ceux qui semblent être heureux. Comme quoi la vie en oublie certains.

Puis, il y a ceux qui profitent de la naïveté de ces gens ayant tout eu, toute leur vie, ayant été aimés, chéris, à qui on a tout donné sur un plateau d'argent, constamment. Il y a ceux qui volent, qui se salissent les mains de sang encore tiède, qui salissent le bitume de traînées rouges que les pas réguliers des Américains qui mènent leur vie à cent à l'heure font bien vite disparaître. Il y a ceux qui ont tellement d'argent, mais que cela tuerait de payer un PV. Il y a cette vieille dame qui empoisonne le chat de la voisine de peur qu'il abîme encore ses précieuses tulipes, mais qui hurle à l'injustice lorsqu'on lui vole son sac à main. Il y a tout ceux dont on ne parle pas, tout ce à quoi on ne croit pas. Il y a cette liberté que la statue qui s'élance dans le ciel New-Yorkais prône continuellement, mais qui se perd jour après jour. Mais on ne s'en préoccupe pas plus que ça. Parce qu'après tout, ça n'arrive qu'aux autres, pas à nous. Qu'est-ce qu'on pourrait bien avoir fait pour mériter ça ?

On continue de vivre, d'emmener nos enfants à l'école, de dire au revoir à son mari au petit matin et de le regarder partir dans son costume acheté la veille. On continue de s'offrir des vêtements hors de prix, d'ignorer cet homme jonchant là, sur le sol, de faire la fête le soir venu, de boire beaucoup, parce qu'on aime tant cette illusion qui naît en nous, celle d'avoir tout réussi, d'être libre, libéré de toutes chaînes. Parce qu'on fond, que peut-on faire d'autre ? La vie continue, parce qu'elle continue toujours. On continue d'être heureux, d'être jeune, d'être con. On ne sait pas qui mourra demain, on ne sait pas quand un au revoir sera le dernier, on ne sait pas quand s'effacera la sensation du dernier baiser déposé sur nos lèvres. Alors on vit au jour le jour, et puis on court toujours plus vite pour éviter de trouver en face de soi tout ce qu'on a jamais voulu voir.

Mais qu'en sera-t-il de vous ?